Elle vit la situation « très difficilement », selon Jean-Paul Teissonnière, son avocat. Et n’a qu’une hâte : « retrouver sa maison » dans les Vosges et son fils de 15 ans qui « déprime » depuis près d’un an. Mise en examen le 29 juin 2017 pour l’enlèvement suivi de la mort du petit Grégory, Murielle Bolle va savoir, ce mercredi, si elle peut rentrer chez elle. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Dijon (Côte d’Or) doit en effet indiquer, à 9h, si elle assouplit son contrôle judiciaire qui la contraint à vivre dans la Nièvre où elle doit pointer deux fois par semaine à la gendarmerie, depuis les rebondissements de cette affaire vieille de 33 ans.
Fin janvier, la chambre de l’instruction avait déjà rejetée une demande similaire arguant que Murielle Bolle pouvait être soumise « aux pressions locales » si elle rentrait dans les Vosges et surtout qu’elle devait être réinterrogée sur le fond du dossier avant de pouvoir retrouver sa maison. « J’espère qu’on ne va pas ressortir cette excuse de l’audition, gronde déjà auprès de 20 Minutes Jean-Paul Teissonnière. La justice a eu dix mois pour l’entendre et elle ne l’a pas fait ! »
Murielle Bolle a-t-elle pris le bus ou la voiture de Laroche ?
Quand bien même elle l’aurait réinterrogée, la juge Claire Barbier n’aurait sans doute pas obtenu plus de Murielle Bolle que la version qu’elle livre depuis le 5 novembre 1984. Après avoir, dans un premier temps, accusé son beau-frère Bernard Laroche du rapt de l’enfant de 4 ans, retrouvé mort dans la Vologne, elle s’était, ce jour-là, rétractée brutalement. Depuis, celle que l’on surnommait « Bouboule » à cette époque maintient qu’elle a pris le bus scolaire le jour du drame et non pas qu’elle est montée dans la voiture verte de Bernard Laroche dans laquelle se serait trouvé le petit Grégory.
« On peut l’entendre autant de fois qu’on le souhaite, elle répétera encore qu’elle n’était pas dans la voiture de Laroche et qu’elle a pris le bus ! », pronostique son avocat. Le problème, c’est que les enquêteurs sont persuadés du contraire. Ayant recueilli « de nombreux éléments prouvant que sa version initiale était la bonne », ils n’ont jamais perdu espoir de la faire « craquer » et de découvrir, enfin, ce qui est arrivé au garçonnet. C’est notamment pour cette raison que Jean-Jacques Bosc, le procureur général, a requis le rejet de sa demande de levée du contrôle judiciaire.
« Tout cela pourrait conduire à un procès dans deux ou trois ans »
Après avoir donné un grand coup de pied dans cette fourmilière familiale, l’an dernier, en procédant à des arrestations 33 ans après les faits, les enquêteurs pensent avoir défini les contours du scénario de la mort du petit Grégory. Selon eux, le garçon de 4 ans aurait été enlevé, le 16 octobre 1984, « par une première équipe » constituée de Bernard Laroche et Murielle Bolle et serait, ensuite, mort à cause des agissements d’une « seconde équipe » formée par Marcel et Jacqueline Jacob, grand-oncle et grand-tante de Grégory, en raison de leur jalousie envers ses parents. Mais depuis ils se heurtent aux dénégations permanentes de tous ces mis en cause.
Des dénégations qu’ils ont même portées en justice, demandant l’annulation pure et simple de leur mises en examen. Ce point doit être tranché lors d’une audience importante le 16 mai. « Si les mises en examen des époux Jacob et de Murielle Bolle venaient à être annulées, ce serait une contrariété, reconnaît Thierry Moser, l’avocat des parents du petit Grégory. Mais je pense que cela n’arrêtera pas la bonne marche de l’instruction. Je crois que tout cela pourrait conduire à un procès dans les deux ou trois prochaines années. »
Une éventualité que Jean-Paul Teissonnière n’envisage pas une seule seconde. « Pour moi, on piétine. Le dossier patine. J’ai le sentiment que les enquêteurs sont dans une ornière. Et ils n’ont pas compris qu’ils n’en sortiraient pas tant qu’ils continueront à penser qu’ils sont dans la bonne direction. »